Neige: naufrage, ou miracle?

La dramatisation, par les media et les politiques, de l’épisode de neige actuel est un peu agaçante. Que nombre de personnes en pâtissent, certes. Et l’on crie haro sur les institutions, gouvernement, SNCF…Les cris de martyre paraissent bien indécents vis à vis de victimes autrement plus graves, tout autour de notre confort dérangé.

Je voudrais rappeler qu’en des temps plus sombres, la neige a pu être le berceau d’un renouveau. 1941…

 » Le souffle du train décoiffait le Pasteur. Les wagons se succédaient en sautant aux jointures des rails, sonores comme un solo de batterie. Il regarda le ciel nocturne en quête d’un signe, quand soudain, venu du train, un orbe le surprit, celui d’une comète suivie d’une longue queue. Mais la trajectoire ne s’enfuit pas dans le cosmos, elle plongea dans la neige, à cinquante pas de lui. Horst courut, s’enfonçant dans la neige jusqu’aux chevilles. Léger, le paquet était resté en surface, la neige l’avait accueilli doucement. C’était un nourrisson nu, encore enduit de liquide amniotique, une soupe primitive qui l’isolait du froid. Le long cordon ombilical ne le rattachait plus à rien, on eut dit le fouet d’un être monocellulaire égaré. Le nouveau-né ne pleurait pas. Les pleurs sont un appel, qui pouvait-il appeler dans ce monde vide? Il savait d’instinct qu’on ne pleure pas devant la Mort, question de dignité.

– Mon Dieu, tu ne m’as pas permis d’enfanter, tu n’as pas voulu que Maria porte jusqu’au bout ma semence et voici que tu m’apportes cet être de chair, tout fini. Qu’attends-tu de moi, qu’attends-tu de cette vie que je viens de prendre en charge?

Il y avait plus urgent que les questions. Vite, il se défit de sa cape, en entoura l’enfant à double tour et, les bras en berceau, partit d’un pas trébuchant vers Maria  »

Ainsi naquit Angela, l’héroïne de mon roman « NEIGE – Allemagne 1941-1967 » , héroïne de fiction, mais conforme à bien des destins d’enfants de déportées, comme l’indique le rapport effaré d’un médecin nazi, le docteur Gutkelch au ministère Rosenberg, daté du 30 septembre 1942.

neige

Et n’est-ce pas le miracle de la neige, d’avoir abrité tant de graines de héros qui ont changé le destin de l’Allemagne, et de l’Europe?

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